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Définir les féminicides
Quoique le terme féminicide existe techniquement depuis le XIXe siècle – on en trouve même des variantes supposément comiques depuis le XVIIe siècle (Vincenti 2020) -, les féministes se le sont véritablement approprié il y a une cinquantaine d’années.
- En 1976, lors du Tribunal international des crimes contre les femmes, Diana E. H. Russel le définit comme « un crime de haine envers des femmes et perpétré par des hommes ».
- En 1992, dans un ouvrage fondateur, Diana E. H. Russell et Jill Radford étudient l’ensemble des formes de féminicide, à la fois dans le contexte privé et dans le contexte public, le comprenant alors comme « l’assassinat misogyne de femmes par des hommes » (1992, 3).
- À la suite de ces premières théorisations, les féministes sud-américaines – notamment Marcela Lagarde et Julia Monárres, ainsi qu’Ana Carcedo et Montserrat Sagot – précisent l’intentionnalité de ce crime, il est dès lors défini comme « l’assassinat de femmes par des hommes parce qu’elles sont femmes » (Russel 2001, 3).
Le terme n’est toutefois entré dans le dictionnaire qu’en 2015.
À partir du travail réalisé par l’Observatoire canadien du fémicide pour la justice et la responsabilisation, voici la classification que l’on pourrait proposer :
- féminicides conjugaux : par le conjoint ou l’ex-conjoint
- féminicides sociaux : lesbophobes, transphobes, racistes, validistes, putophobes
- féminicides criminels : liés au crime organisé, à la traite des êtres humains, à la guerre
- féminicide culturels : basés sur l’honneur, liés à la dot, liés aux mutilations génitales
Compter les féminicides
Le décompte des féminicides a soulevé beaucoup de débats : comment compter les féminicides en dehors du couple hétérosexuel ? Comment mettre en lumière les violences perpétrées contre les femmes les plus précarisées ? Qui s’occupe de la veille journalistique ?
Pour répondre à tout cela, une coalition d’organisations a vu le jour en France, l’IOF, regroupant NousToutes, Acceptess-T, Les Dévalideuses, la Fédération des Parapluies rouges et Act Up. Voici la définition retenue pour dénombrer ces crimes patriarcaux : « meurtre ou suicide forcé d’une femme en raison de son genre, et ce quel que soit son âge ou les circonstances ».
Aurore Vincenti. 2020. « Féminicide ». Le Robert. En ligne.
Diana E. H. Russel. 2001. « Defining femicide and related concepts ». Dans Diana E. H. Russell et Roberta A. Harmes (dir), Femicide in global perspective. New York : Teacher’s College Press, 12-28.
Jill Radford et Diana E. H. Russell. 1992. Femicide : The politics of woman killing. New York : Twayne Publishers Inc.
Margot Giacinti. 2020. « Nous sommes le cri de celles qui n’en ont plus : historiciser et penser le féminicide ». Nouvelles Questions Féministes 39 (n°1) : 50-65.