Simone de Beauvoir (1908-1986)

Temps de lecture : 5 minutes


Son père dit d’abord d’elle, c’est un homme, elle a un cerveau d’homme !

Françoise d’Eaubonne, 2008 [1986], 71

Née en 1908 à Montparnasse dans une famille bourgeoise qui connaîtra la ruine et le déclassement, Simone de Beauvoir fait face à des parents dont l’émerveillement devant les capacités intellectuelles de leur fille sera rapidement suivi par le désenchantement et la rancœur. Selon Françoise d’Eaubonne, grande amie de la philosophe pendant près de trois décennies, cet environnement familial l’affectera grandement – Beauvoir analysera quant à elle ses relations familiales en termes psychanalytiques et œdipiens. Ses brillantes études la conduiront jusqu’à l’agrégation de philosophie, en 1929, dont le sujet s’intitulait Liberté et contingence. Reçue deuxième derrière Sartre, elle devient alors la plus jeune agrégée de philosophie de France ; toutefois, « selon les critères de l’Université en vigueur à cette époque, une femme ne pouvait obtenir une telle place que si elle avait une cinquantaine de points de plus qu’un homme ayant répondu à la même épreuve[,] ce qui fait que, systématiquement « abaissée » à la notation, si elle n’avait pas été du « deuxième sexe », Beauvoir serait passée première devant Sartre » (d’Eaubonne 2008 [1986], 47).

Sa carrière d’enseignante s’arrête en 1943, alors qu’elle est suspendue de l’Éducation nationale suite à une plainte déposée en 1941 par la mère de Nathalie Sorokine, alors son élève, pour « excitation de mineure à la débauche ». Selon Chantal Maillé, les conditions du renvoi ne sont cependant pas des plus limpides. Cette histoire n’est pas une occurence unique dans la vie de la philosophe, en témoigne notamment l’ouvrage Mémoires d’une jeune fille dérangée de Bianca Lamblin. S’il ne faut pas fermer les yeux sur ces événements et s’il convient de réfléchir à ce qu’ils signifient, Sandrine Ricci soulève un point important lorsqu’elle affirme qu’il est « toujours compliqué de revisiter le passé à la lumière de nos schémas actuels » et qu’il importe de « se demander qui a intérêt à déboulonner Simone de Beauvoir ».

À partir de 1943, la philosophe dédie sa vie à l’écriture. Si l’on a surtout retenu d’elle ses essais philosophiques, ancrés dans l’existentialisme et la phénoménologie, elle est également l’autrice de plusieurs romans. Les Mandarins, parus en 1954, lui valent le prix Goncourt, mais il est vrai que ses œuvres de fiction sont généralement mieux connues et reconnues à l’étranger. Son ouvrage le plus célèbre demeure bien évidemment Le deuxième sexe, dont le premier tome « Les Faits et les mythes » paraît aux éditions Gallimard en 1949. Cet essai, dont l’objectif est d’analyser et renverser la domination masculine, est né du sentiment d’une condition féminine commune que toutes les femmes subissent.

La révolution conceptuelle de Beauvoir tient en ces fameuses lignes : « On ne naît pas femme : on le devient. Aucun destin biologique, psychique, économique ne définit la figure que revêt au sein de la société la femelle humaine; c’est l’ensemble de la civilisation qui élabore ce produit intermédiaire entre le mâle et le castrat qu’on qualifie de féminin » (1949, 13). Autrement dit, Beauvoir déconstruit un fait social jusque-là naturalisé, démontrant ainsi que la féminité n’est que représentation collective historique et contingente, et, plus précisément, que les identités sociales des êtres humains sont construites en opposition, en fonction des sexes assignés, faisant de la femme l’altérité même. Cette conception de la féminité aliène également le corps des femmes et les possibilités de ce corps. L’autrice plaide donc pour que les femmes se saisissent de leur liberté et de leur destinée. L’ouvrage rencontrera un franc succès en France et aux États-Unis notamment, mais se heurtera à de nombreuses critiques et réactions relativement violentes.

Vingt ans plus tard, Simone de Beauvoir signera le Manifeste du 5 avril 1971, publié dans Le Nouvel Observateur, et regroupant 343 femmes ayant avorté. Elle affirmera alors que le manifeste « est en accord parfait » avec le contenu du Deuxième sexe.

Simone de Beauvoir et le Mouvement de Libération des Femmes

[Le mouvement féministe] a surgi, bousculant, renversant les concepts traditionnels, innovant à travers des formes de lutte provocatrices. Elle en parle joyeusement, avec fougue. Certaines de ces femmes autoproclamées leader(e)s récusent l’influence de sa pensée, de ses écrits, soupçonnent son féminisme de n’être pas chimiquement pur, elle le constate, hausse les épaules, ne semble pas s’en inquiéter.

Claire Etcherelli, 2008

Si l’association entre Beauvoir et le MLF va de soi dans l’imaginaire collectif, Sylvie Chaperon nous apprend que l’histoire est un peu plus compliquée. L’historienne met de l’avant deux obstacles principaux au développement des relations entre la philosophe et le mouvement, à savoir l’écart générationnel et la notoriété de Beauvoir. Tout d’abord, deux à trois générations se sont côtoyées au sein du MLF, et Simone de Beauvoir, alors âgée de 62, était l’une des plus âgées. D’une part, ses préoccupations n’étaient plus tout à fait les mêmes que celles des militantes plus jeunes ; d’autre part, le système de pensée dans lequel la philosophe s’ancrait était également relativement différent. Car, si elle se disait « radicalement féministe », elle n’appartenait toutefois pas au féminisme radical au sens où d’autres militantes pouvaient l’entendre et ne s’inscrivait pas dans le féminisme révolutionnaire alors prôné. Qui plus est, Beauvoir n’était pas perçue comme une personne bel et bien vivante, mais plutôt comme une icône, créant anxiété et intimation chez les membres du MLF – alimentées par la froideur de la philosophe. Chaperon souligne cependant que ces deux obstacles ont été surmontés grâce à la facilité qu’avait Beauvoir à créer du lien avec les personnes plus jeunes, dont elle trouvait « l’intransigeance, le radicalisme, et les exigences » réconfortantes (1972, 69), ainsi qu’à la distance qu’elle conservait avec les activités du mouvement. Il conviendrait toutefois de poursuivre cette historiographie, pour comprendre plus profondément les dynamiques entre Beauvoir et le MLF.


Christine Guionnet et Erik Neveu. Féminins/Masculins, sociologie du genre (3è édition). Malakoff: Armand Colin.

Christophe Averty. 2020. « « Femmes d’exception » : Simone de Beauvoir ou l’engagement d’une vie ». Le Monde. En ligne.

Claire Etcherelli. 2008. « Quelques photos-souvenirs ». Les Temps Modernes 647-648 (n°1-2): 56-66.

Debra Bergoffen et Megan Burke. 2021. « Simone de Beauvoir ». The Stanford Encyclopedia of Philosophy. En ligne.

Entretien avec Ingrid Galster. 2008. « Les trois vies de Simone de Beauvoir ». L’Histoire. En ligne.

Françoise d’Eaubonne. 1986. Une Femme nommée Castor, mon amie Simone de Beauvoir. Paris : Sofinem/Encre.

Nathalie Collard. 2019. « Faut-il juger Simone de Beauvoir ? ». La Presse. En ligne.

Simone de Beauvoir. 1949. Le deuxième sexe II, l’expérience vécue. Paris: Gallimard.

Simone de Beauvoir. 1972. Tout compte fait. Paris: Gallimard.

Sylvie Chaperon. 2012. « « Momone » et les « bonnes femmes », ou Beauvoir et le MLF ». Dans Christine Bard (dir.), Les féministes de la deuxième vague. Rennes: Presses Universitaires de Rennes.

Recommandations | Les livres à (s’)offrir – édition des fêtes 2021

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Les fictions

  • La Femme qui fuit, Anaïs Barbeau-Lavalette – 23,95$/7,70€
    • « Anaïs Barbeau-Lavalette n’a pas connu la mère de sa mère. De sa vie, elle ne savait que très peu de choses. Cette femme s’appelait Suzanne. En 1948, elle est aux côtés de Borduas, Gauvreau et Riopelle quand ils signent le Refus Global. Avec Barbeau, elle fonde une famille. Mais très tôt, elle abandonne ses deux enfants. Pour toujours. Afin de remonter le cours de la vie de cette femme à la fois révoltée et révoltante, l’auteur a engagé une détective privée. Les petites et grandes découvertes n’allaient pas tarder. »
  • Les Falaises, Virginie DeChamplain – 11,95$/18€
    • « Les Falaises fait le récit d’un chaos à dompter, d’un grand voyage onirique, historique et féminin, qui de la Gaspésie à l’Islande réunit ces survivantes de mère en fille qui admettent difficilement être de quelque part, préférant se savoir ailleurs et se déraciner à volonté. »
  • Shuni, Naomi Fontaine – 19,95$/17€
    • « Naomi Fontaine écrit une longue lettre à son amie Shuni, une jeune Québécoise venue dans sa communauté pour aider les Innus. Elle convoque l’histoire. Surgissent les visages de la mère, du père, de la grand-mère. Elle en profite pour s’adresser à Petit ours, son fils. Les paysages de Uashat défilent, fragmentés, radieux. Elle raconte le doute qui mine le coeur des colonisés, l’impossible combat d’être soi. Shuni, cette lettre fragile et tendre, dit la force d’inventer l’avenir, la lumière de la vérité. La vie est un cercle où tout recommence. »
  • La déesse des mouches à feu, Geneviève Pettersen – 15,95$/6,80€
    • « La déesse des mouches à feu, c’est Catherine, quatorze ans, l’adolescence allée chez le diable. C’est l’année noire de toutes les premières fois. C’est 1996 à Chicoutimi-Nord, le punk rock, le fantôme de Kurt Cobain et les cheveux de Mia Wallace. Des petites crisses qui trippent sur Christiane F. et des gars beaux comme dans les films en noir et blanc. Le flânage au terminus et les batailles de skateux contre pouilleux en arrière du centre d’achats. L’hiver au campe dans le fin fond du bois, les plombs aux couteaux, le PCP vert et les baises floues au milieu des sacs de couchage. C’est aussi les parents à bout de souffle et les amants qui se font la guerre. Un jeep qui s’écrase dans un chêne centenaire, les eaux du déluge qui emportent la moitié d’une ville et des oiseaux perdus qu’on essaie de tuer en criant. »
  • Croc fendu, Tanya Tagaq – 16,95$/20€
    • « Elle grandit au Nunavut dans les années 1970. Elle connaît la joie, l’amitié, l’amour des parents, l’art du camouflage et de la survie. Elle connaît l’ennui et l’intimidation. Elle connaît les ravages de l’alcool, la violence sourde, le courage d’aimer les petites peurs. Elle connaît le pouvoir des esprits. Elle scande en silence le pouvoir brut, amoral, de la glace et du ciel. Dans ce récit venu de loin, d’un espace intime et profond où les frontières s’effacent, Tanya Tagaq chronique les jours terribles d’un village écrasé sous le soleil de minuit. »

Les essais

  • Écrits d’une insoumise, Voltairine de Cleyre – 16,95$/10€
    • « Emma Goldman tenait Voltairine de Cleyre (1866-1912) pour « la femme anarchiste la plus douée et la plus brillante que l’Amérique ait jamais produit », et ce jugement avancé il y a près d’un siècle n’a toujours pas été infirmé. Pionnière du féminisme américain, poétesse, musicienne, celle qui se définissait comme une « anarchiste sans qualificatif » propose une réflexion originale qui touche à un très large éventail de sujets – notamment l’économie, la libre pensée, la philosophie, la religion, la criminologie, la littérature et l’action directe non violente. L’oeuvre d’envergure de cette militante passionnée expose les raisons de sa révolte, témoigne de son espérance d’un monde meilleur et demeure, aujourd’hui encore, d’une brûlante actualité. Cet ouvrage, réalisé sous la direction de Normand Baillargeon et de Chantal Santerre, réunit 16 essais majeurs qui couvrent l’ensemble de son parcours ainsi que 14 poèmes. »
  • Notre sang : Prédictions et discours sur la politique sexuelle, Andrea Dworkin – 19,95$/14€
    • « Théoricienne incontournable, écrivaine incomparable et source d’inspiration de plusieurs générations de féministes, Andrea Dworkin demeure plus d’actualité que jamais alors que les femmes du monde entier se mobilisent pour lutter contre la violence masculine qu’elle a été l’une des premières à désigner et à combattre. Cette essayiste maniait comme nulle autre le verbe, l’humour, la colère, l’espoir. Ce recueil révèle une extraordinaire conférencière qui nous entraîne dans les recoins de la misogynie, du pouvoir masculin, du sadisme et du masochisme sexuels, de la violence, du racisme, de la discrimination. Elle montre les liens qui existent entre l’oppression des femmes, le racisme, le colonialisme, l’esclavage et d’autres formes d’exploitation. »
  • Pourquoi le patriarcat ?, Carol Gilligan – 16,95$/9€
    • « Une hypothèse psychologique à même d’expliquer la perpétuation du patriarcat, forme d’organisation sociale et juridique fondée sur la détention de l’autorité par les hommes. L’auteure fonde son explication sur le choix du sacrifice de la relation altruiste au profit des structures sociales hiérarchiques. »
  • Apprendre à transgresser : l’éducation comme pratique de la liberté, bell hooks – 19,95$/18€
    • « Comment stimuler les étudiant·es ? Comment apprendre des un·es et des autres dans une salle de classe, aussi bien apprenant·es qu’enseignant·es (communauté d’apprentissage) ? La pédagogie radicale émancipatrice ne doit-elle pas mettre l’accent sur la reconnaissance des un·es et des autres pour dynamiser le processus d’apprentissage ? Comment déconstruire les relations existantes entre races, classes et genres ainsi que faire prendre conscience de la production et de la perpétuation des systèmes d’oppression et de domination ? Si bell hooks est connue pour son engagement féministe, l’articulation de cet engagement avec les pratiques dans le domaine de l’éducation et de la pédagogie est moins connue, d’où ce recueil d’essais traduit de l’anglais (États-Unis). Il traite de la pédagogie de l’émancipation. Il aborde non seulement l’importance du féminisme et de l’oppression des femmes, plus particulièrement celle des Noires, qui est spécifique, dans les salles de classe, mais aussi le rôle déterminant des classes sociales et des relations raciales ainsi que de la façon dont la pédagogie des opprimé·es (Paulo Freire) peut s’y appliquer. Il traite du rôle de l’enseignement dans ce processus. »
  • Et ne suis-je pas une femme ?, Sojourner Truth – 15,50$/8€
    • « Recueil d’interventions orales de l’abolitionniste afro-américaine et militante du droit de vote des femmes aux Etats-Unis, née de parents esclaves et inscrite au National Women’s Hall of Fame. Il comprend notamment son célèbre discours prononcé le 29 mai 1851 dans l’Ohio, qui fait date en ce qui concerne les questions du féminisme et du racisme. »

Les livres d’histoire

  • Ne nous libérez pas, on s’en charge, Bibia Pavard, Florence Rochefort, Michelle Zancarini-Fournel – 34,95$/25€
    • « 
    • Comment les féminismes ont-ils émergé en France ? Doit-on parler de féminisme bourgeois ? Quels liens ont existé entre féminismes et socialismes ? Y a-t-il eu des féminismes noirs ? Les féministes étaient-elles toutes colonialistes ? Existe-t-il des féminismes religieux ? Comment s’articulent mouvements lesbien, gay, trans et mouvements féministes ? Quel a été le rôle du féminisme institutionnel ? Qu’est-ce qui est nouveau dans les groupes féministes aujourd’hui ? Qu’est-ce que révèle #Metoo sur la capacité des femmes à se mobiliser ? Ce livre entend fournir quelques clés indispensables afin de penser les féminismes d’hier et d’aujourd’hui à la lumière des grands défis contemporains, des inégalités sociales, raciales et de genre. Cette sociohistoire renouvelée des féminismes rend compte des stratégies plurielles déployées par les femmes et les hommes féministes qui ont combattu les inégalités entre les sexes et l’oppression spécifique des femmes, de la Révolution française à nos jours. »
  • Les femmes ou Les silences de l’histoire, Michelle Perrot – 24,95$/13€
    • « Les femmes ou les silences de l’histoireLes femmes font aujourd’hui du bruit ? C’est en regard du silence dans lequel les a tenues la société pendant des siècles. Silence des exploits guerriers ou techniques, silence des livres et des images, silence surtout du récit historique qu’interroge justement l’historienne. Car derrière les murs des couvents ou des maisons bourgeoises, dans l’intimité de leurs journaux ou dans leurs confidences distraites, dans les murmures de l’atelier ou du marché, dans les interstices d’un espace public peu à peu investi, les femmes ont agi, vécu, souffert et travaillé à changer leurs destinées.Qui mieux que Michelle Perrot pouvait nous le montrer ? Historienne des grèves ouvrières, du monde du travail et des prisons, Michelle Perrot s’est attachée très tôt à l’histoire des femmes. Elle les a suivies au long du XIXe et du XXe siècles, traquant les silences de l’histoire et les moments où ils se dissipaient. Ce sont quelques-unes de ces étapes que nous restitue ce livre. »
  • Écrits autochtones : comprendre les enjeux des Premières Nations, Chelsea Vowel – 31,95$/29€
    • « Rédigés à la suite du rapport final de la Commission de vérité et réconciliation, ces Écrits autochtones se lisent comme on prendrait un café avec un·e ami·e qui nous expliquerait, clairement mais sans simplifier, les concepts et les idées reçues liés aux questions autochtones et, plus précisément, les relations juridiques, politiques et sociales entre les peuples autochtones et le Canada. Avec audace et esprit, Chelsea Vowel explore les expériences autochtones depuis la période postcontact jusqu’à aujourd’hui, à travers différents thèmes : le vocabulaire des relations, la culture et l’identité, l’éclatement des mythes, la violence étatique ainsi que le territoire, l’éducation, les droits et les traités. »

Les petits budgets

  • La crise de la reproduction : entretiens, Mariarosa Dalla Costa et Silvia Federici – 9,95$/8€
    • « Nées en Italie dans les années 1940, Silvia Federici et Mariarosa Dalla Costa sont des militantes pionnières et des intellectuelles féministes de premier plan. Dans ces entretiens avec Louise Toupin, elles reviennent sur le mouvement qu’elles ont cofondé en 1972, le Collectif féministe international, qui fut à l’origine d’une revendication radicale et controversée au sein du féminisme, celle de la rémunération du travail domestique. À partir de ce riche terreau, elles racontent comment s’est développée leur pensée au fil du temps, et formulent une critique intersectionnelle du capitalisme néolibéral, depuis la notion de crise de la reproduction sociale. »
  • Sororité, Collectif dirigé par Chloé Delaume – 7,99$/6,70€
    • « Sous la forme de récits, fictions, poèmes ou chansons, une réflexion collective sur la sororité. La solidarité entre les femmes se révèle être l’un des principes fondateurs du combat féministe. »
  • Pour l’intersectionnalité, Eléonore Lépinard et  Sarah Mazouz – 9,95$/5€
    • « Une analyse consacrée à l’intersectionnalité, un concept créé dans les années 1980 par des féministes de couleur pour désigner les processus d’imbrication et de co-construction de différents rapports de pouvoir. L’histoire de cette notion, son instrumentalisation politique ainsi que les résistances qu’elle suscite sont notamment évoquées. »
  • SCUM Manifesto, Valerie Solanas – 7,95$/4,50€
    • « En renversant l’image de la femme comme être inférieur par nature pour l’appliquer à l’homme, l’autrice démonte la mécanique de la domination masculine. Un pamphlet littéraire et politique, où l’humour et la provocation révèlent les rapports de force entre les sexes. Depuis sa diffusion dans les rues de New York par Valerie Solanas en 1967. SCUM Manifesto est devenu un texte culte du féminisme. »

Les bandes dessinées et guides didactiques

Les livres jeunesse

  • [3-6 ans] Bébé antiraciste, Ibram X. Kendi et Ashley Lukashevsky – 12,99$/ND€
    • « On ne naît pas bébé antiraciste, on le devient. Un bébé antiraciste est élevé pour faire évoluer la société. Apprenons-nous à être racistes ou antiracistes? Heureusement, il y beaucoup de choses que nous pouvons faire pour faire de l’équité une réalité. Ouvrir nos yeux et voir toutes les couleurs de peau, en parler et aller à l’encontre de politiques racistes constituent de bons moyens de combattre le racisme. Nous avons le pouvoir de transcender les idées reçues et d’œuvrer pour le bien. De ne pas juger un livre selon son apparence et de le lire jusqu’à la fin. Cet album d’actualité, en rimes et rempli d’illustrations en couleurs, permettra aux parents et aux gardiens de déclencher des conversations sur le racisme avec les enfants. »
  • Histoires du soir pour filles rebelles (T1), Elena Favilli et Francesca Cavallo – 34,95$/19,90€
    • « Véritables contes de femmes – et non simples contes de fées, ces Histoires du soir pour filles rebelles permettront à tous les enfants de se rêver un destin extraordinaire et sans limites. Pirates, scientifiques, romancières, sportives, guerrières, reines et chanteuses, les 100 femmes d’hier et d’aujourd’hui qui figurent dans ce brillant et splendide livre ont eu l’audace de franchir des obstacles et de combattre les injustices pour réaliser leurs rêves. »
  • Histoires du soir pour filles rebelles (T2), Elena Favilli et Francesca Cavallo – 34,95$/19,90€
    • « De Nefertiti à Beyoncé en passant par J. K. Rowling et Audrey Hepburn, ce bouquet de femmes inspirantes prouve aux enfants que peu importe leur couleur, leur statut, leur âge ou leurs moyens, ils peuvent accomplir de grandes choses. Un livre percutant à mettre entre toutes les mains! »
  • Histoires du soir pour filles rebelles (T3) : 100 jeunes qui changent le monde – 34,95$/ND€
    • « Oubliez Cendrillon, la Belle au bois dormant ou Blanche-Neige et célébrez les Greta Thunberg, Billie Eilish et Farah Abilay du monde entier! Après des ventes incroyables de près de sept millions d’exemplaires des deux premiers tomes, le phénomène mondial se poursuit dans un nouveau recueil qui rend hommage à cent jeunes femmes fascinantes qui changent le monde à leur façon. Illustré par des artistes féminines ou non-binaires du monde entier, ce livre culte est un objet aussi agréable à regarder qu’à lire. »
  • Collection de Bandes dessinées « De Petite À Grande » : Simone de Beauvoir, Amelia Earhart, Marie Curie, Rosa Parks… – 16,95$/9,95€
  • La Coalition des familles LGBT+ recommande plusieurs livres pour enfants, ici.

Ressources | La contraception

Il existe différentes méthodes pour éviter une grossesse, toutefois, seuls les préservatifs permettent d’éviter la transmission d’infections. Par ailleurs, le retrait n’est pas une méthode de contraception efficace et ne prévient pas non plus la transmission d’infections.

La contraception hormonale (pour les personnes qui produisent des ovules)

  • La pilule contraceptive (contraceptif oral combiné ou contraceptif oral à progestatif seul)
  • Le timbre contraceptif (à coller sur la peau)
  • L’anneau contraceptif (à insérer dans le vagin)
  • Le dispositif intra-utérin à libération progressive de lévonorgestrel
  • Le contraceptif injectable (quatre fois par an)
  • L’implant contraceptif (tige flexible placée sous la peau qui libère un progestatif dans le sang)

La contraception non hormonale

  • Les préservatifs (pour pénis ou pour vagin)
  • L’éponge contraceptive (à insérer dans le vagin)
  • La cape cervicale (à placer sur le col de l’utérus)
  • Le diaphragme (qui recouvre le col de l’utérus)
  • Le spermicide (à insérer devant le col de l’utérus en complément d’un autre mode de contraception)
  • La vasectomie (pour fermer le canal déférent)
  • La ligature des trompes par laparoscopie ou voie abdominale / l’obturation des trompes par hystéroscopie
  • Le dispositif intra-utérin en cuivre

Les méthodes naturelles

  • Suivre le cycle de fertilité
  • La méthode de l’allaitement maternel et de l’aménorrhée (efficace pendant les six premiers mois suivant l’accouchement si les menstruations ne sont pas revenues)

La contraception d’urgence

  • La pilule dite du lendemain (les CU-LNG, traditionnelles, devant être prises moins de cinq jours après la relation en sachant que leur efficacité diminue de jour en jours, ou la CU-UPA, qui fonctionne plus longtemps)
  • Le dispositif intra-utérin en cuivre inséré dans les sept jours suivant la relation

La typologie présentée ici est issue de la société des obstétriciens et des gynécologues du Canada. Pour plus d’informations, cliquez ici.

À cette typologie doivent être ajoutées deux méthodes de contraception pour les personnes produisant du sperme, répertoriées par l’Association pour la Recherche et le Développement de la Contraception Masculine : la contraception thermique (sous-vêtement chauffant, jockstrap, anneau en silicone/androswitch) et la pilule contraceptive (diméthandrolone undécanoate). Quoique les contraceptions dites masculines existent depuis une trentaine d’années selon l’ARDECOM et que l’on commence timidement à aborder le sujet dans les médias, elles demeurent très confidentielles.


La coercition reproductive

Selon l’Institut National de la Santé du Québec, la « coercition reproductive réfère à des comportements de contrôle ou de force commis dans le but d’interférer ou d’orienter la trajectoire contraceptive et reproductive de l’autre partenaire » et se manifeste de trois façons principales : le sabotage contraceptif, les pressions relatives à la grossesse, et la coercition lors de la grossesse. Car, si une relation sexuelle doit être consentie, la contraception doit l’être également. Par exemple, le retrait non consenti du préservatif lors d’une pénétration se nomme le stealthing et constitue une forme de violence sexuelle.

Pour en savoir plus :


La charge sexuelle

La charge sexuelle n’est autre qu’un versant de la charge mentale appliquée à la vie reproductive et sexuelle, et se décline, selon Clémentine Gallot, en plusieurs types de charges mentales reposant majoritairement sur les épaules des femmes dans les relations hétérosexuelles :

  • la charge médicale (rendez-vous et dépistages)
  • la charge contraceptive (choix, suivi, conséquences)
  • la charge érotique (désirabilité)
  • la charge orgasmique (phallocentrisme)

Pour en savoir plus :

Espace de la cause des femmes

Temps de lecture : 2 minutes


L’espace de la cause des femmes est un concept que l’on doit à Laure Bereni, développé dans sa thèse de doctorat, publiée en 2007. Ce concept s’appuie sur celui d’espace des mouvements sociaux élaboré par Lilian Mathieu dans un article publié la même année et défini comme « un univers de pratique et de sens relativement autonome à l’intérieur du monde social, et au sein duquel les mobilisations sont unies par des relations d’interdépendance ».

Ainsi, l’espace de la cause des femmes renvoie dans un premier temps à « l’ensemble des collectifs – et leurs participantes – qui luttent au nom des femmes et pour les femmes, quels que soient les termes de la lutte et la sphère dans laquelle elle se déploie » (2007, 23), avant qu’il ne soit spécifié et entendu comme la « configuration des sites de mobilisation pour la cause des femmes dans une pluralité de sphères sociales » (2012, 28). Les collectifs appartenant à cet espace doivent répondre à deux caractéristiques : œuvrer au nom des femmes et pour les femmes (2007, 25). Qui plus est, il existe au sein même de l’espace de la cause des femmes différentes mouvances en fonction des clivages idéologiques externes transposés dans un espace nécessairement transversal et hétérogène (2007, 27).

Définir le militantisme en ces termes permet de prolonger les concepts de mouvement des femmes et de mouvements féministes en sortant de la dichotomie traditionnelle entre institutionnel et non institutionnel, affinant ainsi la sociologie des mouvements sociaux. Car, les actrices luttant pour la cause des femmes traversent souvent les frontières des différents milieux (plus ou moins) militants, qu’il s’agisse de l’administration publique, du milieu associatif, des partis politiques, du monde académique, etc. – ainsi qu’a pu le montrer Lee Ann Banaszak dans son ouvrage incontournable The Women’s Movement Inside and Outside the State (Cambridge University Press).


Laure Bereni. 2007. De la cause à la loi. Les mobilisations pour la parité politique en France (1992-2000). Thèse de doctorat en science politique. Université Panthéon-Sorbonne, Paris I.

Laure Bereni. 2012. « Penser la transversalité des mobilisations féministes : l’espace de la cause des femmes ». Dans Christine Bard (dir.), Les féministes de la deuxième vague. Rennes : Presses Universitaires de Rennes.

Lilian Mathieu. 2007. « L’espace des mouvements sociaux ». Politix 77, (n°1) : 131-151.

Le gaslighting, le décervelage, ou le détournement cognitif

Temps de lecture : 2 minutes


Le concept du gaslighting est un néologisme emprunté à la langue anglaise, dérivé d’une pièce de théâtre britannique intitulée Gas Light, écrite par Patrick Hamilton et publiée en 1938 – puis adaptée au cinéma en 1940 au Royaume-Uni, par Thorold Dickinson, et en 1944 aux États-Unis, par George Cukor. L’histoire met en scène un mari fourbe et menteur, qui manipule sa femme en modifiant des éléments de leur environnement, de manière à détériorer sa santé mentale. La littérature scientifique et médicale s’approprie alors rapidement ce concept, que l’on définit traditionnellement comme une « manipulation visant à faire douter une personne d’elle-même en ayant recours au mensonge, au déni, à l’omission sélective ou à la déformation de faits, et ce, afin de tirer profit de l’anxiété et de la confusion ainsi générées » (Office Québécois de la Langue Française). Autrement dit, le détournement cognitif est une violence psychologique.

Appliqué à la cause féministe, le terme de gaslighting est utilisé pour dénoncer, à la fois dans des contextes conjugaux et militants, les tentatives des oppresseurs (généralement des hommes) de faire douter les oppressé·e·s (généralement des femmes) de leur expérience, de leur crédibilité et, in fine, de leur légitimité. Il s’agit donc de recourir à divers outils – souvent rhétoriques – pour altérer la perception des victimes de leur réalité, de manière à les manipuler et les silencier.


Pour en savoir plus :