Mary Wollstonecraft (1759-1797)

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Cette hyène en jupons, Madame Wollstonecraft.

Horace Walpole, 1795

Mary Wollstonecraft est reconnue comme étant le pilier du féminisme égalitaire moderne – en partie grâce à Virginia Woolf, qui a su revaloriser son œuvre alors fortement discréditée, en raison de sa vie sentimentale complexe et perçue comme immorale. L’on retient principalement son ouvrage A Vindication of the Rights of Woman: with Strictures on Political and Moral Subjects (en français : Défense des droits des femmes, suivie de quelques considérations sur des sujets politiques et moraux) paru en 1792. Elle est également l’autrice de plusieurs autres livres dont le fer de lance a toujours été l’éducation, peu importe le degré politique de l’œuvre en question.

Ses revendications principales

L’épitre dédicatoire de la Défense fournit des éléments clés de sa pensée, en synthétisant ainsi son argument principal : « si la femme n’est point préparée par l’éducation à devenir la compagne de l’homme, elle arrêtera le progrès des Lumières ». Ce qu’elle accuse, c’est cet « hommage spécieux » fait aux femmes, par le culte d’une féminité douce et docile, supposément naturelle, et à cultiver. Ce carcan de l’adoration masculine est véhiculé par de nombreux auteurs, et c’est notamment à Rousseau qu’elle s’en prend. Elle démonte ainsi point par point les arguments tirés de son traité d’éducation, l’Émile, et soumet une approche alternative. Alors que Wollstonecraft souligne la nécessité de traiter les femmes en êtres raisonnables, elle déplore que, « pour [les] rendre faible[s], ou belle[s], on néglige [leur] intelligence ». Autrement dit, elle regrette que les femmes n’existent que par rapport aux hommes et pour les hommes. Elle soutient qu’en bénéficiant d’une éducation rationnelle et morale, plutôt que d’une mise en valeur constante d’une féminité toute construite, les femmes pourraient atteindre l’indépendance financière et jouir d’une plus grande liberté – il est important de souligner qu’elle n’était pas non plus une fervente adepte du mariage.

Son legs conceptuel

Son travail sera par la suite repris et approfondi, notamment par Harriet Taylor Mill, autant qu’il constituera un appui important pour les militantes à venir ; et ce en dépit des fortes critiques dont elle fera l’objet, considérée, en raison de sa vie personnelle, comme déséquilibrée émotionnellement, donc, tout sauf crédible.

En 1989 a été introduit, par Carole Pateman, le concept de dilemme de Wollstonecraft, qui demeure incontournable pour les études féministes et de genre, mais également pour la science politique. Il s’agit de la tension et de l’incompatibilité entre l’égalité et la différence dans les revendications des droits des femmes. Qu’est-ce que cela signifie ? Qu’en se battant contre l’inégalité il est inévitable de mettre de l’avant sa différence, or c’est cette même différence qui est à l’origine de l’inégalité

PS : Saviez-vous que l’autrice de Frankenstein n’est autre que la fille de Mary Wollstonecraft ?


Carole Pateman. 1989. The Disorder of Women : Democracy, Feminism and the Welfare State. Stanford University Press.

Cathia Jenainati et Judy Groves. 2010. Introducing Feminism: A Graphic Guide. London : Icon Books Ltd.

Mary Wollstonecraft. 2024. Défense des droits des femmes. Paris : Gallimard.

Morwenna Griffiths. 2014. « Educational Relationships: Rousseau, Wollstonecraft and Social Justice ». Journal of Philosophy of Education 48 (2) : 339-354.

Valerie Sanders. 2006. « First wave feminism ». Dans Sarah Gamble (dir.), The Routledge Companion to Feminism and Postfeminism. Taylor & Francis e-Library : 15-24.

Crédit image © John Opi

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